EYE 2 EYE: Lost Horizon (ROCK PROGRESSIF) : avis / chronique à lire sur Music Waves

Et si Eye 2 Eye était finalement le secret le mieux gardé du rock progressif français ? Voilà 25 ans maintenant que l'aventure, débutée du temps d'ADN en fin de siècle dernier par le batteur Didier Pegues et le claviériste Philippe Benabes, nous produit régulièrement des albums dont la richesse est soulignée, sans que cela ne remue les foules plus que cela (mais c'est peut-être une caractéristique généralisée dans notre beau pays). Certes, le groupe ne se produit pas sur scène, certes sa production n'est pas non plus pléthorique, certes les moyens mis en œuvre n'ont pas toujours été à la hauteur du talent de composition, mais "Nowhere Highway" avait clairement monté d'un cran la qualité de production. Et quoi de mieux pour continuer l'ascension avec ce nouvel album que de confier les rênes du chant au gallois Paul Tilley dont l'expressivité fait merveille tout du long de cet opus intitulé "Lost Horizon" ?

Après une introduction sur fond de chœurs grégoriens, un gros riff de basse soutenu par une rythmique furieuse lance les hostilités de 'Garden of Eden'. L'ambiance est sombre, très sombre, le metal n'est pas loin, les chœurs deviennent inquiétants, les claviers tournent aux cuivres, avant une parenthèse enchantée où le violon, une guitare acoustique et des chœurs féminins apportent une pause de douceur, ponctuée par un solo de guitare déchirant. Mais ces instants de calme de font qu'annoncer un nouveau déluge rythmique, emballé par un orgue Hammond omniprésent qui entraîne l'auditeur jusqu'au bout de ces quelques 10 minutes totalement intenses.

Dans un mode beaucoup plus calme et accessible, 'The Letter' ramène Eye 2 Eye dans des contrées un peu plus familières aux oreilles de l'auditeur coutumier de leurs productions, avant que 'Meadows of Silence' ne reprenne le flambeau pour 12 minutes d'un rock progressif totalement excitant. Une basse énorme pose les bases d'un nouvel epic, au cours duquel les variations de tempo et d'ambiance permettent au groupe de distiller toutes les facettes de son talent de composition et d'interprétation. L'ambiance n'est une nouvelle fois pas très joyeuse, pouvant même servir de bande son aux batailles du "Seigneur des Anneaux" ! Et dans ce mode mineur généralisé, la musique se fait de plus en plus expressive, démonstration faite notamment en milieu de plage par un solo de guitare poignant posé sur une montée chromatique des claviers et des arpèges de basse.

La plage titre, divisée quant à elle en trois parties, va finir d'enfoncer le clou du haut de ses 22 minutes, avec un propos quelque peu adouci, conviant par moment IQ au cours de la deuxième partie entièrement instrumentale, faisant également la part belle au piano et aux cordes (violon/violoncelle), tandis que Bruno Pegues emprunte par moments les traces de David Gilmour. Quelques tics viennent néanmoins ternir cette belle harmonie (le chant doublé sur les fins de phrase de la première partie, totalement agaçant, ou encore quelques voix un peu trop forcées), mais rien qui n'empêche de profiter jusqu'au bout de cet univers clôturé là encore par une troisième partie aux multiples visages, entamée et terminée en balade ternaire mais proposant un pont central de nouveau ultra dynamique propre à faire remuer les têtes sur des variations rythmiques de toute beauté.

Avec une production à la hauteur de leur talent d'interprétation et de composition, le quatuor d'Eye 2 Eye se détache clairement des codes traditionnels du néo-progressif (étiquette qu'il ne conviendrait d'ailleurs plus de leur attribuer), et se fend d'un album qui devrait, qui doit susciter un intérêt plus que particulier de tout amateur de rock progressif.

EYE 2 EYE

LOST HORIZON

PROGRESSIVE PROMOTION

ROCK PROGRESSIF