BETWEEN THE BURIED AND ME: The Blue Nowhere (METAL PROGRESSIF) : avis / chronique à lire sur Music Waves

Après quatre années d'attente depuis "Colors II", Between The Buried And Me déboule enfin avec le onzième album d’une discographie qui n’a jamais laissé indifférents les amateurs de metal progressif exigeant. La vraie question était surtout de savoir comment le groupe, désormais réduit à un quatuor, allait surmonter le départ de Dustie Waring. La réponse tient en soixante-et-onze minutes d'un labyrinthe musical fascinant où l'excellence technique côtoie une audace créative parfois déroutante, mais toujours impressionnante.

"The Blue Nowhere" est sans conteste l'album le plus éclectique de la formation américaine. Dès l'entame, ‘Things We Tell Ourselves In The Dark’ pose les jalons d'une œuvre résolument expérimentale : un groove funky quasi-Princien, soutenu par une ligne de basse d'une précision redoutable, cède progressivement la place à une architecture complexe où la virtuosité s'exprime sans aucune retenue. Et cette générosité créative débordante ne faiblit pas pendant toute la durée de l’album.

D'ailleurs, c'est peut-être dans cet éclectisme forcené que résident à la fois la force et la faiblesse de "The Blue Nowhere". Between The Buried And Me refuse la facilité, quitte à perdre parfois l'auditeur, qui navigue entre death metal technique et piano dissonant (‘Psychomanteum’), valse déjantée et rock progressif (‘Slow Paranoia’), boogie metal et breaks rockabilly (‘Absent Thereafter’) ou encore metal indus et rock atmosphérique (‘God Terror’).

Pourtant, qu'on le veuille ou non, cette débauche d'inventivité force l'admiration. Et la grande nouveauté réside dans l'intégration élargie de cordes et d'instruments à vent. Déjà présents par touches dans le passé, saxophones, clarinettes, tuba et quatuor à cordes s'affirment ici comme une véritable architecture sonore, donnant à certains passages une ampleur presque cinématographique (‘Absent Thereafter’, ‘Slow Paranoia’).

Cette orchestration enrichie transforme fondamentalement la palette musicale du groupe, créant des moments d'une beauté saisissante, notamment sur le magnifique et très moderne ‘Beautifully Human’ (que ne renierait sans doute pas Haken) ou encore sur le titre ‘The Blue Nowhere’, morceau pop rock inédit dans le catalogue du groupe, qui, avec sa structure couplet-refrain surprenante, démontre que Tommy Rogers et ses acolytes maîtrisent aussi bien la retenue que l'exubérance.

Alors certes, certains regretteront sans doute la cohésion narrative des précédents opus conceptuels, remplacée ici par une approche plus impressionniste, faite de "journaux intimes, lettres et pensées introspectives", selon les mots de Tommy Rogers. Mais, même dans ses excès les plus déconcertants, "The Blue Nowhere" témoigne d'une sincérité artistique rare. Il faut du temps pour l’apprivoiser, le laisser décanter, comprendre sa logique interne. Mais une fois ce travail accompli, cet album spectaculaire révèle ses trésors cachés et confirme que Between The Buried And Me demeure l'un des groupes les plus audacieux de la scène metal progressive contemporaine.

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