À peine un an après leur succès, "Love Hurts", et l’album "Hair Of The Dog", voilà de nouveau Nazareth sur la brèche avec un nouvel album. Pour capitaliser sur leur succès aux États-Unis, ou simplement car le groupe a toujours été prolifique, qui sait ! S’il voulait vraiment séduire les US, on peut douter du choix de "Telegram" comme titre d’intro.
C'est en effet une longue pièce en plusieurs mouvements, racontant avec pas mal de hargne le parcours de groupes en tournée. Une véritable pépite qui faisait dire à l’ époque qu’elle 'méritait à elle seule l’achat de l’album'. Un crescendo de basse, quelques notes de piano, et la voix de Mac Cafferty ! Et puis une batterie de plomb: c’est incontestablement une des intros les plus mémorables du Hard-Rock ! Deuxième mouvement, on grimpe en intensité. Les voix trafiquées se marient à la voix naturellement infernale de l’écossais, et puis arrive de manière un peu impromptue un break pop : "So You Wanna Be A Rock 'n Roll Star" qui laisse ensuite se déchaîner la guitare de Charlton, pour retrouver dans une explosion bien sentie, la mélodie initiale. Là, la guitare se fait proche d’un Bryan May qui guide l'énergie du morceau où elle le veut, en symbiose avec cette voix définitivement déchirée et une basse lourde à souhait. Le titre se termine avec un nouveau refrain pop: vraiment pas le genre de titre calibré pour les radios et surtout pas les US. Plutôt une sorte de "Bohemian Rhapsody" semi-métallique. Il reste que Nazareth, alors qu’il tenait l'outre-Atlantique entre ses mains, se laisse aller à sa créativité sans penser un quart de seconde que ces 9 minutes posées en début d’album, aussi bonnes soient-elles, seront toujours un handicap commercial.
Après une telle entrée en matière un peu iconoclaste, il était curieux de voir comment le groupe allait enchaîner la suite de l’opus. Plutôt que d’enfoncer le clou, Nazareth rafraîchit l’atmosphère avec "Vicky", instrumental soudé à "Home Sick Again". C’est puissant, assez massif et la fin se fait plutôt accrocheuse, très bon morceau, mais qui n’ambitionne absolument pas de nous la jouer "Love Hurts II" ! Les titres qui suivent sont du même bon tonneau: des influences de blues et de rock sudiste comme ZZ Top ou Lynyrd Skynyrd. Influences aussi un peu country que l’on retrouve dans la ballade "Carry Out Feelings".
Loin d’être mauvais, il reste cependant un goût de trop peu au plat de résistance en comparaison avec l’intro dévastatrice de ce "Telegram". Vient alors "You’re The Violin", un mid-tempo introduit à la guitare emmené par une rythmique presqu'un peu funky. C’est à la fois mélodique et puissant, une petite perle d’émotion, la vraie signature de Nazareth. L'album se termine comme il a commencé !
Avec l’audacieuse introduction "Telegram", Nazareth qui avait le marché US à portée de main, n’a pas fait de compromis ! Bien qu'il ne l'ait pas composé, son talent pour la mélodie et l'interprétation lui aurait permis d'enfanter un successeur à "Love Hurts ", et il ne l'a pas fait ! Au contraire, Nazareth s’est laissé aller à ses envies et convictions, sans calcul, pour nous pondre un excellent album des plus sincères ! C’est certainement ce qui fera sans doute la longévité du groupe, mais aussi son absence de reconnaissance par le grand public. Et entre nous: c’est tant mieux !